J’écoute de temps en autre sur France Inter une rubrique assez divertissante qui s’intitule «moi président».
Le journaliste y interroge des français divers et variés et leur demande ce que seraient leurs premières mesures et leur programme s’ils étaient élus Président de la République. Encore faut-il avoir un programme… ou une idée de programme.
Vu qu’aucun n’est candidat, ça ne mange pas de pain de se lancer et l’on entend un peu tout et n’importe quoi. Parfois n’importe quoi comme cette actrice dont la principale préoccupation serait de changer les paroles de la marseillaise (because le sang impur… Bla bla bla…). On y écoute aussi des propositions beaucoup plus pragmatiques, d’autres anecdotiques et légères. Ca ne fait de mal à personne et ces gens là ont généralement des propositions assez personnelles qui ont au moins le mérite de ne pas avoir été concoctées dans les sous-sols de la banque Rothschild.
La semaine dernière, alors que je cherchais une place sur les quais de Trinquetaille, France Inter donne la parole à une «moi président», féminine, philosophe, bardée de diplômes et pleine de certitudes sur l’évolution du monde. Une chance.
Pour notre super diplômée philosophe, la clef de voute de son demain «moi président», son Alpha et son Omega, c’est la condition animale.
Je vous passe les détails pour m’arrêter sur un point : la nourriture. Il faut préciser à ce stade que la dame est vegan. La barre est haut placée.
Elle nous explique un tas de trucs et notamment que tout ce que nous consommons de viande ou chair animale et produits animaliers pourra être avantageusement remplacé par des légumes, parfois oubliés, du tofu, et je ne sais plus quoi… Bla bla bla…
Pourquoi pas. Soyons larges d’esprit, et admettons que l’on puisse remplacer, et même avantageusement remplacer ce que nous ingurgitons par des légumes et du tofu et que nos organismes s’y retrouvent. Admettons.
Elle a juste oublié un petit détail la philosophe : le plaisir, l’hédonisme (A ne surtout pas confondre avec l’épicurisme).
Le plaisir Madame, le plaisir. Celui de sentir le gras d’un jambon Ibérique vous engourdir le palais. Palais que l’on électrisera ensuite pour un plaisir accru avec l’amertume toute en subtilité d’un «mirando al sur» de chez Olivier Rivière ou une manzanilla de Sanlucar.
Le plaisir d’une côte de boeuf fondante et maturée, chez notre ami Romain, de «pas comme les autres». Le plaisir de sentir sous la dent les fibres de la viande et se laisser envahir par ce jus et ces arômes évolués, qui s’accorderont à merveille avec un Saint-Joseph de chez Gonon, ou un Vieux Ronsard de chez Engelvin…
Le plaisir des huitres de Pascal Migliore Madame, des huitres grasses et iodées, comme jamais ne sera ni gras ni iodé un morceau de tofu ou n’importe quel légume, que je peux apprécier par ailleurs. Laisser glisser sur ces huitres un muscadet de chez Jo Landron pour le prolonger ce plaisir, encore et toujours, longtemps.
Le plaisir Madame le philosophe… le plaisir…
Oh ! certes, on doit pouvoir faire abstinence de ce plaisir là, comme d’autres, vivre sans. C’est peut-être possible. Mais à la vue des conséquences de l’abstinence dans les rangs de certaines congrégations, vraiment j’ai un doute.
Mais ce doit être possible. Peut-être.
Mais peut-être pas. Et j’ai bien peur à la vérité que ces gens là soient des frustrés de la pire espèce. J’en veux pour preuve que les mangeoires qui leurs sont dédiées proposent des burgers vegan et une espère de saloperie dénommée «faux-gras» censée imiter, vous l’aurez compris, le foie gras. Un tel degré de frustration et de tels palliatifs ont de quoi faire peur.
Une chose est certaine. Les diplômes et les titres ne font pas tout.