logo

Cornada de espejo

vacheIl est raisonnable de penser que les toreros n’oublient jamais les coups de corne qu’ils ont reçus. C’est d’autant plus compréhensible que certaines cornadas laissent des traces indélébiles et obsédantes comme de mauvais refrains de chansons d’été. C’est le cas des cicatrices que les espagnols appellent cornadas de espejo, que l’on pourrait traduire littéralement comme « coups de corne de miroir ».
Les cicatrices de ces blessures reçues au visage giclent comme de mauvais souvenirs lorsque le torero se regarde tous les matins dans la glace. Une petite torture psychologique, le rappel implacable du moment fatidique, du toro et de la blessure. Comme la balafre d’Ángel Teruel pour le coup de corne qu’il reçut en avril 2012 dans les arènes d’Arles. Pour son côté extrême et tragique, on se souvient aussi de l’effroyable cornada infligée à Franco Cardeño par à un toro de Prieto de la Cal à Séville en 1997, qui lui arracha la moitié du visage (un autre Florent vous rafraichira la mémoire ici).

José Vicente Ramón Ruiz est dans la plénitude de ses vingt ans et tirant profit d’une excellente condition physique, s’éclate pendant l’été 1994 à écarter des vaches dans les villages proches de Valencia. Lors d’une belle soirée du mois d’août, il est à pied d’œuvre dans l’enceinte montée sur la place d’Alborache à l’occasion de ses fêtes taurines. Lors d’un raset à une fameuse vache de Fernando Machancoses, José Vicente glisse et s’affale sous le museau de la Golondrina (hirondelle en français) qui le cueille, et lui refile une trempe monumentale contre les barrières avant de lui apprendre à voler en l’expédiant dans les gradins d’un coup de tête. Pas de cornada mais trois fractures qui valent bien un petit séjour à l’hôpital et un surnom qui ne le lâchera plus jamais : Golón. Un petit cadeau des copains, une raillerie pour l’éternité afin de rappeler régulièrement à ses douces oreilles son lien quasi charnel avec la vache Golondrina. Une sorte de cornada de espejo en plus sympathique et sans cicatrice apparente.

Laisser un commentaire

*

captcha *