À dix-sept heures trente, les deux petits vieux en chaise roulante sont garés près de la sortie des arènes, juste à l’endroit où s’arrête l’arrastre — le toro à leurs pieds, ou à leurs roulettes, ça dépend comment on le voit. À la fin du deuxième toro, ils disparaissent. J’imagine qu’on les emmène au bar jouer aux cartes, ou à la maison pour se reposer et prendre un verre d’horchata et fartons. J’aime bien m’imaginer ce genre de trucs et me faire mes films.
À dix-sept heures trente, les gitans sont positionnés sous les gradins, avec le casse-croûte, la chaise de camping et la glacière, parfois, la poussette posée à côté et les gamins qui courent dans leurs pattes. Dans quelques minutes, ils colleront un œil sur l’interstice lumineux entre les planches de la talanquera pour voir la novillada. À l’œil, évidemment.
À dix-sept heures trente, le Manhattan et le Chester, abreuvoirs assourdissants, sont pleins à craquer et vomissent leur surplus de clients fumeurs sur les trottoirs de la rue de la Muntanya. Agglutination jouasse et bariolée. — Florent Lucas