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« Ta gueule connard ! »

Dimanche 28 juillet 2019. Orthez
6 toros de Prieto de la Cal pour Alberto Lamelas, Jesus Enrique Colombo et Angel Sánchez.


Au micro, la voix de la commission taurine d’Orthez annonça que l’élevage combattu ce dimanche ensoleillé, Prieto de la Cal, fêtait cette année ses cent ans d’existence. L’Histoire oblige alors soyons précis : c’est le fer créé par Florentino Sotomayor, le A dans un cercle, qui portait le poids d’un siècle (présentation à Madrid en 1919). En ce qui concerne le sang qui coule dans les corps savonneux des Prieto, il faut remonter le temps beaucoup plus avant 1919 quand le Duque de Veragua donna ses lettres de noblesse au sang Vázquez. Ce dimanche, pourtant, trois toros (les 1, 4 et 5) auraient pu être estampillés Sotomayor (croisement Miura / Parladé), réminiscences  de ce toro du début du XX° siècle que les livres nous ont transmis méchants, retors, compliqués, dangereux ; ce toro de faena courte qui nécessitait un toreo fondé sur les jambes, de macheteo et par le bas. Las, 2019 a la mémoire courte et l’un des fondements de la tauromachie a vécu : à chaque toro sa lidia ! Hier à Orthez, la terna qui relevait déjà sur le papier de l’erreur de casting (Colombo et Sánchez) a démontré son incapacité à tenter de réduire la violence et la méchanceté de ces trois toros de Prieto de la Cal. L’obsession du derechazo (le plus souvent très profilé) dès l’entame de faena, l’absurdité de fabriquer des faenas trop longues sous le diktat contemporain de la duración, la non prise en compte de la nécessité de changer parfois de terrain ont privé public et aficionados d’une leçon d’histoire. Les Prieto, comme souvent les Veragua, sont des toros explosifs qui ne sont pas adaptés à des centaines de passes. La corrida proposée par Tomás Prieto de la Cal fut décevante dans sa globalité (bien présentée dans son ensemble) car si elle alla promptement et de loin au cheval, un seul poussa réellement en mettant les reins, le reste se résuma à un combat au corps à corps durant lequel tous les piqueros de l’après-midi démontrèrent le peu d’estime qu’ils ont pour la beauté possible du tercio de varas : piques traseras, dans les épaules, pompage etc. Ils furent à l’image de cuadrillas dépassées, multipliant les passes, décomposant un peu plus des toros qui n’en demandaient pas tant. Last but not least, les Prieto déçurent, encore une fois sommes-nous contraints d’écrire, par l’état des cornes des six astados. Si le premier se brisa la corne (certes le règlement n’imposait pas le changement mais l’esprit aurait dû prévaloir car quel spectacle affligeant que cette corne pendouillante et saignante), les autres affichèrent des défenses escobillées et explosées dès les premiers coups de cornes donnés dans les tablas. Afeitado ? Votre serviteur a du mal à y croire venant d’un ganadero droit dans ses bottes dans son refus de poser des fundas sur ses toros. Problème de génétique ? La question reste entière mais la vision de ces cornes dégradées fit monter la moutarde au nez de quelques aficionados a los toros qui ne se privèrent pas de faire connaître à voix haute leur courroux et selon nous à fort juste titre. Pour toute réponse, l’un d’entre eux, qui avait payé sa place (ça ne justifie pas tout nous en convenons mais cela se respecte tout de même), eut droit à un vociférant ‘Ta gueule connard !’ hurlé depuis le callejón par le représentant en chef de la commission taurine des lieux. Un grand moment de classe, de délicatesse, de sens de la retenue entendu par deux mille convives. Corrida décastée, con genio, corrida anachronique que le temps présent est incapable de saisir. La passé a du souci à se faire.

Nota : en matinée furent tués quatre novillos nuls et très faibles de Pablo Mayoral. L’ennui sous le soleil.

  1. Aymeric MARTINEZ Répondre
    Bonjour, Super chronique , comme toujours !! Les cornes des 5 derniers toros m'ont donné du sang dans les yeux... Si même à Orthez les toros sortent affeités, nous allons droit dans le mûr.... 35€ pour voir cela après notre Sainte Madeleine cela commence à faire beaucoup (TROP) ! Adisahtz

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