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El Rey

Madrid, début des années 90. Le roi en barrera en compagnie de l’incombustible Curro. Le brindis, de Joselito. La chose avait fait couler pas mal d’encre. Joselito le républicain. Le Pepito Arroyo d’Alfonso Navalón. Le texte qui suit est de Régis de Castelnau qui anime le site «Vu du droit»
Sur ce qui se passe aujourd’hui, comme souvent, Régis de Castelnau écrit très juste. 
Je n’ai pas réussi à vous partager son texte autrement qu’en le copiant ici..

Rubrique : lever son chapeau.

Je me souviens du garottage de Salvador Puig Antich,
Je me souviens du slogan : « et hop plus haut que carrero Blanco ! »,
Je me souviens du procès de mon camarade Marcelino Camacho terminant sa harangue par un sonore : « Viva la libertad ! » Et une salle d’audience entière se levant pour répondre : «Viva !»,
Je me souviens du massacre d’Atocha et de l’exécution par les vrais fascistes ceux-là, de mes trois camarades avocats communistes : Enrique Valdevira Ibáñez, Luis Javier Benavides Orgaz et Francisco Javier Sauquillo Pérez del Arco, accompagnés dans la mort par Serafín Holgado de Antonio, et Ángel Rodríguez Leal,
Je me souviens de ma traversée en moto de cette Espagne irrespirable pour passer au Portugal qui venait de se libérer,
Je me souviens de tant de choses,
Mais aussi de ce jeune roi qui avait accepté de sacrifier sa jeunesse à l’ombre d’un personnage immonde, en échange d’un trône dont il devait penser, qui sait, qu’il pourrait y faire quelque chose pour sa patrie,
Je me souviens de tous ces camarades qui 40 ans plus tard, le jeune roi sur le trône, rentraient enfin chez eux. Avec à leur tête, Dolores Ibarruri élue députée aux Cortes en juin 1977, et seule dans ce cas retrouvant son siège de 1936,
Je me souviens de ce 23 février 1981 et de l’irruption de Tejero aux Cortes et de l’angoisse qui nous étreignit tous.
Je me souviens de l’intervention télévisée du roi, tout de calme et de fermeté, nous rassurant et clôturant ce jour-là cette guerre d’Espagne commencée le 18 juillet 1936, et mettant définitivement à bas le dernier gouvernement fasciste d’Europe,
Je me souviens de ces amis espagnols me disant qu’en fait le roi voulait sauver la monarchie et qu’il savait que seule la démocratie le lui permettrait. Peut-être… Et après ?
Alors majesté, aujourd’hui la société du spectacle veut, que dis-je, exige qu’on vous crache dessus. Parce que vous avez aimé les femmes, la chasse, et aussi à l’automne de votre vie l’argent. Tous les professeurs de morale sont de sortie, prenant la pose. Oubliant ou refusant de reconnaître ce que vous avez fait, ce qu’ils vous doivent, y compris lorsque vous avez abdiqué au moment où il le fallait pour votre fils, pensant probablement, et personnellement je vous en fais le crédit, que c’était bien pour votre pays. La presse des oligarques parvenus et les meutes ignares des réseaux peuvent pratiquer l’exercice qu’ils préfèrent, le lynchage sans savoir. Ils ne savent pas par exemple et surtout ils s’en foutent, que votre liste civile de retraite annuelle est inférieure de moitié à celle de François Hollande qui toute sa vie a porté préjudice à son pays. Ils ne savent pas grand-chose non plus de ce que vous auraient donné les saoudiens et pourquoi, mais comme ceux-là sont arabes, musulmans, et absurdement riches, vous êtes déjà une des figures du mal d’aujourd’hui.
Pour préserver votre fils, vous avez décidé de retourner à l’exil que vous avez connu dans votre enfance. Ce geste vous honore, car vous savez que les chiens ne vous lâcheront pas, et qu’ils sont décidés à vous pourrir le temps qu’il vous reste à vivre. Alors, autant qu’ils ne le fassent pas en Espagne.
Je ne vous ai pas connu et ne vous connaîtrai jamais, mais je pense sans m’avancer que nous n’aurions été d’accord sur rien : politique, chasse, argent et même probablement les femmes…
Ce que je sais en revanche, c’est que lorsque vous allez tirer votre révérence et si vous le faites avant moi, je lèverai mon chapeau au passage de votre cercueil.

Régis de Castelnau

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