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Plaza numéro un – Post COVID 19

On y est donc arrivé… Une féria d’importance a finalement pu se dérouler du début à la fin, sur une durée presque normale, au temps du corona virus chinois. L’exploit a été réalisé par les arènes de Nîmes, coproduction Simon Casas, en étroite collaboration avec les autorités locales.

Allez savoir pourquoi la même empresa a été incapable, depuis le déconfinement, de faire sortir un seul animal du toril de las Ventas, arènes qu’elle dirige aussi actuellement. Cette interrogation s’ajoutera à la longue liste des intrigues et incompréhensions qui ne cessent de s’accumuler inexorablement depuis l’apparition de ce maudit virus.
Ou au contraire, peut-être est-il préférable d’ignorer les raisons obscures qui font que la temporada espagnole est si mal en point. Le fait est que le Colisée nîmois a été le théâtre en 2020 d’un cycle de cinq spectacles taurins au cours d’un week-end, appelé féria des vendanges.
Nîmes est donc officiellement l’arène numéro 1  de l’orbite taurine !
Toutes mes félicitations aux responsables. Évidemment, les grincheux objecteront qu’il s’agissait de la temporada 2020, année où par exemple, les pires cancres ont obtenu le bac sans sortir de leur maison… voire même, pour les pires des pires, sans sortir de leur lit.
Alors de là à octroyer le titre de plaza numéro 1 aux arènes de Nîmes, après tout. Remarquez au passage qu’il s’agit d’un doublé pour ma ville dont le club de foot vient d’être éphémèrement leader de la ligue 1 après la 1ère journée de championnat covid. Les Nîmois seraient donc les meilleurs en période de coronavirus. Mais le temps de l’écrire et c’est déjà fini. Mes compatriotes nîmois peuvent être fiers…

Mais doivent avoir  le triomphe modeste. Imaginez par exemple, la stupeur d’un aficionado madrilène en train d’assister devant son poste de télé, à la meilleure corrida (Victoriano del Río) de la plus grande féria de l’année ! Mais si, mais si, la plus grande féria de l’année 2020 ! Pincez-vous. Le chroniqueur du grand quotidien El País, Antonio Lorca, a failli s’étouffer en découvrant une plaza et un public qu’il pensait de première catégorie. Grosse déception devant sa télé, en découvrant le conclave nîmois qu’il qualifie de « farandulero y generoso  ».
Il faut avouer que quatre oreilles et une vuelta pour une tarde de destoreo, c’est beaucoup pour l’éphémère plaza numéro un. Et encore, il ne se doute pas que la course fut présidée par le plus rigoureux de nos présidents. Certes, ce dernier a paru souffrir de « dj-valadisation » accélérée, octroyant musique et trophées à la moindre occasion.
Il est vrai  que la vie d’un aficionado nîmois en pleine pandémie n’est pas des plus faciles. Une semaine avant le confinement, il fêtait l’annonce du retour –enfin- dans ses arènes de José Tomás.

Et alors qu’il s’apprêtait à célébrer le toreo engagé et profond du mythique maestro de Galapagar, voilà que, pour cause de virus, on lui propose de s’extasier devant les créations narcissiques d’Enrique Ponce. T’en veux, toi, de la rupture épistémiologique ? Les experts nous avaient pourtant prévenus. Avec ce virus, la vie ne sera plus la même. Désormais, l’aficionado ferait mieux de penser que finalement ce toreo millimétré à la Tomás, n’était qu’une imposture. À la faveur d’une épidémie, la vérité poncista s’est imposée : toréer al hilo est bien plus dangereux que de se croiser et charger la suerte. Essayons la novlangue taurine :  » quelles leçons de risques avons-nous vécu avec Ponce ce vendredi !
Un désengagement de tous les instants, sans faille, sans jamais contraindre ses victorianos, ni tomber dans la facilité du toreo de verdad… pardon, désolé du réflexe, je voulais dire du toreo de pacotille. Quel suspens insoutenable pour le spectateur qui, le ventre serré, la gorge nouée, assistait à cette démonstration de courage… pourvu qu’il n’avance pas la jambe, que la muleta reste bien à hauteur du corps. Comment à cet âge canonique peut-il encore résister à l’envie de se croiser et de briser ce parallélisme pour dessiner le fameux point d’interrogation ? Quel délice de voir le matador égrener des unipasses, pour laisser respirer le bicho, éviter une nouvelle génuflexion, et ne jamais céder à la tentation de la ligazón. Trois oreilles s’il vous plait. »

La contagion de ce toreo périphérique a touché les deux compagnons de cartel, peut-être soucieux de rendre hommage à leur glorieux aîné ou plus simplement, adeptes de ce nouveau paradigme taurin.
Avant ce sras-cov-2, on aurait plutôt écrit : Curro Díaz et Emilio de Justo sont restés largement en-dessous des qualités de leurs opposants, dont le lot fit preuve d’une belle mobilité dans son ensemble et apporta un intérêt constant à la corrida. En prime, la présentation était nettement au-dessus du standard local.
De Curro Díaz, on retiendra essentiellement une époustouflante entame de faena au cinquième pour amener son opposant au centre du ruedo.
Emilio de Justo toucha le toro le plus encasté de l’après-midi. Après avoir mis l’eau à la bouche, notamment sur un quite par chicuelinas. Il laissa filer cette occasion en or mais coupa une oreillette. Auparavant, l’extremeño avait soigneusement évité de mettre en évidence ce toraco, spectaculaire à la première rencontre, mais qui sortit seul d’une seconde, trop brève.
Ceci, ajouté à l’absence de troisième pique, rend la vuelta al ruedo très discutable, en dépit de la belle caste affichée par ‘Descreido’, seul exemplaire marqué du fer de Toros de Cortés.

Il va donc probablement falloir s’habituer encore quelque temps aux corridas post covid… ou sinon, pour les vieux aficionados trop fragiles, rester chez soi et éteindre la télé.

Frédéric BRUSCHET

  1. Anne Marie Répondre
    Ah, enfin ! CyR sort du silence. Et cela fait plaisir. Bienvenue à Frédéric. La relève ? J'ai beaucoup, beaucoup apprécié tout ce que j'ai lu. Nîmes est aussi ma ville. D'adoption. Elle a trop changé... Je demeure à un saut de puce dès Arènes. Quel plaisir pour moi de courir vers elles. Même pour y voir Ponce et consort, et des toros à 3 pattes. Mais c'est comme ça. Je les aime bien. Et comme je n'ai pas l'opportunité d'aller voir ailleurs malheureusement... Mais là, il était hors de question que j'aille voir ce cirque de pseudo Vendanges. Même pas voir les bêtes aux corrales. C'était vraiment se ficher de nous. Merci Simon, merci Jean Paul, et peut-être à l'année prochaine.

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