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Méchant

Aire-sur-l’Adour – Dimanche 01 mai 2016
3 Novillos de Valdellán (1, 2 et 6) (présentation dans l’esprit de l’élevage : des types différents entre l’avacado et plus fin dernier et le costaud et musculeux second. Tous noirs) et 3 novillos de Saltillo (3, 4, 5) (le 3 fut « asaltillissime », un rat léger, fin, vif et degollado au possible. Les deux autres furent plus dans la ligne Santa Coloma, plus gonflés en volume, plus larges de culasses, cardenos.) pour Manolo Vanegas, El Conquero (blessé au 2 puis au 5) et Tibo García.


Tibo García a des airs de jeune banquier practico ce qui n’empêche pas, dans l’absolu, d’avoir la planta torera… mais lui ne l’a pas. Ni la planta ni le « bagage » pour être annoncé face à ce desafío ganadero entre Valdellán et Saltillo. Le petit monde taurin français a beau jeu de se mentir — et de lui mentir — et de relever « son courage malgré son peu de bagage » mais, à l’heure du bilan, Tibo García n’a rien à faire dans les rangs des novilleros avec picadors. Alors courage, cojones et « t’as qu’à y aller » ne pèsent pas lourd quand un toro digne d’être ainsi qualifié officie dans le ruedo. Tibo García est la victime, consentante on imagine, de ses représentants qui n’ont à la bouche que le mot « respect » qu’ils écrasent de leurs zapatillas en lançant ce jeune dans le bain des piquées et à la face déconfite d’un public en droit d’attendre bien plus que ce néant de lidia et de torería offert à Aire en ce jour — passons sur la faena proposée face à l’ultime Valdellán, endive trop cuite mais novillo qui plaisait – « il est bon celui-là ! » – à certains dans le callejón. Tu m’étonnes Ginette. Nous ne vîmes pas ‘Bravio’ de Saltillo, petit rat parfait, remuant et exigeant, compliqué et toro dans sa tronche. García le laissa se balader dans le ruedo comme un petit chien qui visite un lieu nouveau sans obéir à la voix du maître qui lui intime de revenir. Pas plus que nous ne vîmes les qualités de charge de ‘Cigarrón’ que García affronta en lieu de place d’un Conquero inédit en piste. Mais les oranges ne se pressent pas toutes seules et les trois avis marchaient vers nous de concert quand ‘Cigarrón’ se coucha, plein les pattes de les prendre pour des couillons et d’attendre qu’on veuille bien lui « monter dessus ».
La jeunesse, le manque logique et attendu d’expérience ne peuvent être les éternelles excuses de cette catégorie de course de toros. L’exemple de Conquero est à ce titre assez révélateur. ‘Marmolejo’ de Valdellán, après de fortes piques où il chargea uniquement le cul du cheval, prévint tout son monde qu’il ne s’en laisserait pas compter en coupant les terrains lors du second tiers, à gauche et à droite Que nenni, le Conquero se plante au milieu de la piste et colle un cite suicidaire à dix mètres conclu par un strike de côté qui lui ouvre la cuisse de l’intérieur.
Trente minutes plus tard, face au puissant et brave en 4 rencontres ‘Cigarrón’, Conquero crache à la gueule des passes de châtiments et subit un second strike, cette fois-ci bien dans le buffet, droit, franc et propre de la part du Saltillo.
Ne restait que Vanegas, chef de lidia et qui fut toute la course dans le ton de celle-ci. Alors oui il est encore jeune, alors oui il commet des erreurs (la mort est son défaut) mais au moins a-t-il rempli son rôle de novillero. Il prit bien la mesure de l’exigeant Valdellán de Conquero mais c’est surtout face à ‘Astador’ de Saltillo qu’il convainquit les présents. Face à un novillo très tardo au cheval mais fort et fier — trop peu piqué évidemment car le caractère tardo du bicho avait fait durer le tiers, ce que les gens ne supportent plus, pas plus qu’ils ne supportent qu’un cheval dépasse une ligne. Un spectateur, un seul, a crié un « nooon » de baryton quand sonnèrent les clarines et il avait raison ! — Vanegas offrit une faena désordonnée mais sérieuse, se permettant le luxe de coller deux ou trois naturelles avec la jambe avancée sur le terrain d’un Saltillo de su puta madre, un toro encasté et complexe, se retournant vite mais qui, dominé, poussait la charge loin.
On m’apprit dans la soirée que Gabin Rehabi — ex-aequo —avait été récompensé pour des piques qu’il ne donna pas au dernier Valdellán de la soirée — il fut vertement prévenu dès son entrée en piste par un spectateur venu d’une bourgade dont les coordonnées GPS sont les suivantes 42.4853 (latitude) et 2.748 (longitude) qu’ici ce n’était pas un cirque et qu’il fallait rester sérieux. Piqué dans son orgueil, le varilarguero star s’ingénia à faire montre de toute sa science cavalière (c’est gentil de sa part mais c’est vrai qu’on s’en moque) et oublia par deux fois qu’une pique ne se porte pas au milieu des reins. Après tout, comme personne ne s’en offusqua, pourquoi se priver ? — . On m’apprit aussi que le prix prévu pour l’élevage ayant envoyé les meilleurs trois novillos était déclaré desierto. Les prix en tauromachie sont comme les promesses électorales et ne sont faits que pour ceux qui y croient. Je ne crois plus à tout ça et ne me fais plus aucune illusion en la matière. Je sais seulement que des Saltillo, ils peuvent en faire venir par wagons entiers l’an prochain à Aire. C’est méchant le Saltillo. Fier, encasté, parfois brave et surtout méchant et hargneux. Aturins, rachetez des Saltillo… les autres, achetez-en !

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