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Le campo est un silence

LL-arauz1Ce sont des chats qui vous accueillent sur le perron, la gueule figée dans les derniers rayons du soleil. Un coq et des poules aussi. Et des gosses qui suivent leur grand-père sans cri ; petites ombres attentives qui ne lâchent pas les toros des yeux. Des toros, il n’en reste qu’une demi-douzaine dans un cercado boursouflé d’herbes grasses et hirsutes, et pas un barroso. Chez Araúz de Robles, le barroso 1 c’est comme le berrendo en negro chez Jódar y Ruchena : une marque de fabrique. Mais il n’y en avait plus pour cette année, nous a dit le grand-père, au demeurant mayoral du lieu.

Il devait embarquer un cuatreño pour un festival ; il ne savait plus où ni d’ailleurs s’il s’agissait bien d’un festival. Les gamins l’ont aidé, ils ont ouvert des portes, ils ont pris les poses des adultes habitués à ce genre de manœuvre, la jambe en travers du passage étroit, le pied calé sur la rambarde et l’œil fier devant des inconnus qui ne pouvaient que regarder.

Les toroscárdenos, negros, costauds — allaient et venaient, s’arrêtaient, nous toisaient, repartaient, revenaient. Ils glissaient, noyés dans le moutonnement encore bien vert du cercado, et seul s’entendait ce bruissement de toros qui couraient dans des herbes trop hautes.

Les gamins n’ont pas dit grand-chose, les toros non plus, et le grand-père a souri et c’était déjà beaucoup et ça valait des mots.

En quittant la finca, un jeune barroso a arrêté sa course, nous a observés. On reviendra.

1. Barroso : si l’on en croit Adolfo Rodríguez Montesinos, dans son ouvrage Pelajes y encornaduras del toro de lidia (Ibercaja, 1994), le pelage barroso appartient à la plus large famille des jaboneros. Le barroso serait la teinte la plus sombre des jaboneros, et contient des reflets cendrés que le vétérinaire et ganadero associe à la couleur de la « boue fraîche ». Rodríguez Montesinos mentionne également qu’il convient de ne pas confondre le barroso, plus sombre, avec le jabonero sucio.

Retrouvez :
— Sous la rubrique « Galeries »,
deux séries — une en noir et blanc et l’autre en couleur — consacrées à l’élevage de Araúz de Robles.
— Sur notre ancien blog, un texte de Jérôme ‘El Batacazo’ Pradet sur l’élevage Araúz de Robles : « Si Monet avait vu ça ».
— Sur le site Terre de toros, la fiche de la ganadería Araúz de Robles.

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