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Aucun bouquet ne vaut pour moi… (X)

LL-Fpalhanb2La Quinta das Areias est invisible depuis la route qui lui roule pourtant sur les pieds. De grands arbres centenaires la dérobent encore aux regards et aux bruits. Un étroit chemin grêlé de gouttes de lumière qui filtrent à travers la verdure monte droit tout d’abord, puis vire à gauche en haut de la petite côte.

C’est là, dans le virage à gauche, que la maison se dévoile, lourde et puissante, haute et pointue, ni château ni palais, pas tout à fait réelle ici et maintenant, concevable en son temps.

Le lieu est atmosphère.

Il y a dans la droiture des haies qui bordent le chemin, dans l’espièglerie contenue des fourrés alentours, dans le calme serein que seule une brise de printemps tiède et ouateuse caresse et fait frémir, tout ce que le siècle — le XXe siècle — a manqué de ravir. Et sans peine, l’esquisse surannée d’une ombrelle irisée d’un soleil métallique de mars, l’élégance raide, parfaite, d’un costume trois pièces, la causerie mondaine pour que le temps figé des bourgeois de l’époque — la « Belle Époque » — se donne de l’espoir, sans peine donc, au pied de la maison, surgissent comme d’un livre de Maupassant les tableaux impressionnistes d’un dimanche à la campagne.

C’est en 1905 que la Quinta das Areias, alors grande propriété agricole sise à Castanheira do Ribatejo et propriété de la casa Palha, devient le centre névralgique de cette grande famille. D’après le bref historique qu’en a dressé l’Instituto de gestão do património arquitectónico e arqueológico, la Quinta a connu deux phases : elle aurait été acquise au milieu du XIXe siècle par António José Pereira Palha à des fins uniquement agricoles. C’est son fils José Pereira Palha qui la fit fructifier. Ainsi l’institut estime qu’à la fin du XIXe siècle « as parcelas afectas aos trabalhos agrícolas contabilizavam um número impressionante: entre 1000 e 1200 hectares estavam destinados ao cultivo de cereais (trigo, cevada e milho) e legumes, enquanto que 1300 hectares eram de uso exclusivo para o gado ».

À ses origines, la Quinta das Areias n’était habitée que par les travailleurs affectés à ces terres. Néanmoins, il est aisé d’imaginer que la proximité de Vila Franca de Xira et du Tage donnèrent des idées à Palha, qui y fit construire les premières habitations de la famille qui se trouvent aujourd’hui au bord de la route reliant Vila Franca de Xira à Carregado et qui servent de bureau à la famille, et peut-être un jour de futur musée de son histoire ganadera.

Ce n’est qu’en 1905 donc, toujours selon l’Instituto de gestão do património arquitectónico e arqueológico que fut érigée la « Casa grande », également nommée le Palacete. Cette vaste demeure de style néogothique, massive mais sans ostentation, fut initiée sur l’idée d’un des deux fils de José Pereira Palha, Constantino Palha, qui ne put goûter longtemps les charmes du lieu puisqu’il décéda des suites de la tuberculose en 1910. C’est le fils de ce dernier et de Maria do Patrocínio Van Zeller — une cousine —, José Van Zeller Pereira Palha, qui dirigea la ganadería à partir de 1924 quand son grand-père plongea lentement mais sûrement dans la dépression et l’évitement du monde. C’est par le biais de ce Van Zeller Palha, amateur de toros et de fado, que l’élevage de José Pereira Palha changea du tout au tout par l’introduction du semental ‘Compadrito’ de Juan Belmonte en 1937. On attendit la mort du patriarche pour oser transformer son œuvre. ‘Compadrito’ était un pur Gamero Cívico, donc Parladé, donc bien loin des Vázquez/Miura qui avaient fait de Palha un nom et une légende.

« Quand j’étais enfant, j’ai vu ici, dans ce cercado, le semental de Belmonte. Ici, à Vil Figueiras. Pensez donc que ce Belmonte n’avait jamais affronté un vrai Palha de toute sa carrière, et c’est avec lui qu’on acheva les toros de mon arrière-grand-père ! »

La suite est une autre histoire et les Palha Blanco sont morts…

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