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Aucun bouquet ne vaut pour moi… (XXXI)

Entre les cornes d’un Palha parladeño, c’est tout un futur qui s’ouvrait sur les prés de « Vil Figueiras » et « Recouçao » ; une genèse qui éloignait l’élevage de l’utopie veragüeña. Fortement dilué dans ‘Chinarra’, qui fut couverte par des mâles Pinto Barreiros chez Ribeiro Telles, éparpillé dans ses filles, clairsemé dans ses petites-filles, le sang Veragua des Palha Blanco s’accrochait à ses terres en lui conservant les couleurs que tous les autres cheptels uniformisaient dans leur conversion au Parladé.

Le Veragua n’était pas un but en soi dans l’esprit du ganadero. Il faut plutôt le concevoir comme une nécessité d’ordre ontologique pour celui qui voulait faire renaître un soupçon de l’héritage disparu (ou presque) du fondateur. Faire du Veragua pour faire du Veragua n’avait aucun sens, si ce n’est d’être un contresens à cette époque-là, mais instiller du Veragua représentait une étape indispensable dans le projet d’ensemble, ne serait-ce que pour approcher le type morphologique des Palha d’antan et pour restituer une part des anciens Palha Blanco. Le comportement viendrait plus tard.

À la fin des années 1960, au Portugal, les ganaderías pouvant se prévaloir d’une origine vazqueña devaient se compter sur les doigts d’une main. Aujourd’hui, mise à part celle de Fernando Palha et, dans une moindre mesure, une partie de celle de Pedro Canas Vigouroux, il ne subsiste absolument rien de cet encaste auquel l’histoire du toreo doit pourtant beaucoup.

Au demeurant, l’Espagne voisine n’est, à ce sujet, malheureusement pas en reste. D. Tomás Prieto de la Cal et Concha y Sierra 1  sont la partie émergée d’un iceberg à qui l’on donnerait plus volontiers le qualificatif de glaçon. Ainsi, chaque année qui passe, et qui traîne derrière elle son lot d’annonces de ventes ou d’envois au matadero, il devient de plus en plus complexe de croiser dans les chaleurs du campo des toros d’origine vazqueña un tant soit peu dignes d’attention.

En Navarre, la famille Fraguas (sous le fer de La Pajarita) s’accroche au rêve de Jesús — tué en 2007 par un semental d’origine Veragua acheté à Julio de la Puerta —, qui racheta, en 2002, le troupeau de Wenceslada de Paz.

Avec Madrid pour panorama quotidien, les élevages de Javier Gallego 2 et Aurelio Hernando revendiquent eux aussi l’origine Veragua de leur bétail, ce que leur conteste Tomás Prieto de la Cal depuis son idyllique finca de « La Ruiza », à San Juan del Puerto, dans la province de Huelva.

Au Campo Charro, d’ombrageuses encinas centenaires dissimulent encore les ultimes Villagodio (croisement opéré par le marquis de Villagodio entre des vaches Santa Coloma et des mâles Veragua) sous le fer de Agustínez, mélange rare très marqué par la physionomie Veragua, mais que Luis Fernández Salcedo considérait comme mauvais dans ses Cuentos del viejo mayoral — d’autres élevages revendiquent un mélange Santa Coloma/Veragua comme les Vega-Villar ou les dérivations de la famille Mayoral.

Pour qu’elle fût un tant soit peu exhaustive, il convenait d’ajouter à cette liste l’élevage peu connu de Núñez Alventus, tapi dans les abords venteux et flamencos de Trebujena. Là, dans une finca où cohabitent pas moins de quatre ou cinq fers, sont encore « tientées » des vaches 3 qui appartinrent autrefois à Curro Chica — on retrouvait également cette origine chez Julio de la Puerta, qui semble l’avoir sacrifiée ces dernières années —, dont l’origine renvoie le lecteur vers un certain Jacinto Trespalacios, qui fut éleveur de taureaux de combat… deux fois dans sa vie. L’afición est un vice dont il est difficile de se départir.

1. La ganadería a été vendue, en 2013 à Jean-Luc Couturier, également acquéreur, en 2012, des Valverde du Campo Charro.
2. Délocalisé depuis quelques années dans la province de Ciudad Real, à côté du gros bourg industrieux de Puertollano.
3. Depuis notre visite, en mai 2014, l’espoir tourne au désespoir.

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