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Further On Up The Road

Parentis-en-Born, 09 août  2015 —

11 heures : Quatre novillos de Los Maños (Santa Coloma – Buendía) pour Guillermo Valencia et Louis Husson.
18 heures : Quatre novillos de Castillejo de Huebra (1, 3, 5 et 6) et deux de José Manuel Sánchez (2 et 4) pour Miguel Angel León, David de Miranda et Alejandro Marcos.


Retour à la plage comme si de rien était. Le sable grouille d’êtres humains huileux qui s’observent du coin de l’oeil le bourrelet de trop, le sein qui tombe ou la cellulite honnie. Les enfants sont heureux à manger du sable et le léger vent du nord n’apporte, pour l’instant, qu’une fraîcheur de bon aloi.
Mais rien n’est pas. La tauromachie, dans ce qu’elle a de meilleur, emporte le vide et occupe l’esprit. Hier, à Parentis-en-Born, un petit homme colombien a bouffé du sable comme les enfants heureux sur cette plage et, comme eux, il a souri après, la caboche tuméfiée par les roustes infligées par les impressionnants
novillos de Los Maños.
Quatre étaient prévus, nous en vîmes cinq — le troisième, ‘Cecilio’ n° 35, se brisa la patte avant droite sur une arracanda et fut remplacé par ‘Tostadino’, n° 21, armé pour achever sa vie dans les calles poussiéreuses du Levant plutôt que dans un ruedo tant l’excès de cornes le faisait ressembler à un zébu ou à un cousin proche.

Le lot était adulte — s’il est possible d’utiliser ce terme en évoquant des utreros — sur le plan physique : novillos cuajados, emmorrillados, con mucho trapío. Il l’était aussi au moral mais dans le genre adulte dans sa plénitude imparfaite : les idéaux ne sont plus que de vagues souvenirs mais affleurent parfois, la naïveté s’effiloche à mesure que filent le temps et l’esprit d’aventure, ce goût du foutre le camp qui a été érodé par une vie de labeur, de gamins et de prêts bancaires; on devient casanier, on aime son chez soi. Les novillos de los Maños ont tous adoré leur chez soi, c’est-à-dire ce terrain très clairement défini par un arc de cercle dont le point d’achoppement était la porte du toril. Ils ont aimé le cheval, beaucoup et fort, mais parfois mal, la tête en haut, peut-être trop fiers comme l’adulte qui refuse de se soumettre à sa jeunesse qu’il voit mourir. Ni mansos perdidos ni totalement braves, ils furent ce pourquoi on les éleva : de vrais toros de combat pétris de caste et d’exigence. Face à eux, Guillermo Valencia a été grand. Quand il met la jambe, il met la jambe. Quand il cite un toro, il tend la main devant lui et non pas sur le côté comme ont pris l’habitude de la faire ses tristes compères. Quand il prend un toro dans la gueule comme ce fut le cas avec le très très encasté ‘Jardinero’ n° 33 puis avec ‘Tostadino’, il se relève, sait que c’est de sa faute à lui et plante un estoconazo fissa et dans les règles de l’art. Après tout cela, il sort en triomphe avec le mayoral d’une ganadería que nous espérons revoir très vite.
Derrière la barre, les surfeurs attendent. Ils dévisagent l’horizon. Ils sont de plus en plus nombreux chaque année. Cet océan qu’ils assiègent ne se ressent pas à Parentis. C’est étrange d’ailleurs. Il est proche, on le sait, mais comme absent. Les arènes sont contemplées par un château d’eau sur lequel courent des toros. À deux rues de là, une usine noire crachote toujours. Le parking est poussiéreux. Parentis, c’est le nord des toros. Pas de mur blanc parfaitement repeint mais on a mis des fleurs dans les arènes. Avant les pins, on disait que les Landes était le désert français. On devait vivre dur ici. J’ai repensé à une chanson de johnny Cash. Un truc de cowboy où il parle de flingues et d’une route sombre mais pas que. Il finit en disant que demain va sourire et qu’on se retrouvera un peu plus loin. J’ai repensé à cette chanson « Further On Up The Road », j’ai trouvé qu’elle collait bien à Parentis…et à Guillermo Valencia.

Note : à 18 heures furent lidiés — très mal — des novillos de Castillejo de Huebra et José Manuel Sánchez. Le lot fut très desigual de présentation, oscillant entre les solides 1, 4 et 6 et la sardine sortie en 3. Les novillos furent dans l’ensemble fades et manquèrent de poder et de bravoure. Pour autant, certains d’entre eux démontrèrent une réelle noblesse durant le troisième tiers, noblesse à laquelle il manquait la chispa qui rend les combats passionnants. Les trois novilleros, Miguel Angel León (monsieur pico), David de Miranda (totalement dépassé) et Alejandro Marcos (c’est lui qui montra les gestes les plus beaux au très noble troisième) furent à l’unisson des bêtes, malheureusement.
Le dernier novillo, ‘Altanero’, n° 30, fut un véritable manso perdido que la cuadrilla de Marcos eut le plus grand mal à faire piquer. Il convient d’écrire aussi qu’une partie du public n’a toujours pas saisi qu’un manso de catégorie peut et doit être carioqué et si nécessaire comme ce fut le cas ici, à côté du toril. Il eut été d’ailleurs opportun que le président de la course impose la sortie du second piquero. Enfin, concernant ce dernier novillo, son comportement ne laisse pas de nous interroger sur le fait qu’il s’agissait certainement d’un burriciego, c’est-à-dire un toro voyant bien de loin mais très mal devant lui.

  1. Xavier KLEIN Répondre
    Entièrement d'accord sur l'analyse, Laurent.

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