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Buenas tardes tristeza

corridaUne heure avant que ne débute l’ultime corrida du cycle sanferminero 2016, un membre du jury du Prix Carriquirri avouait, les traits marqués par neuf jours de ripailles en tous genres, qu’il manquait une chose essentielle à l’arène de Pamplona pour changer de dimension : un tercio de varas digne de ce nom. Et nous de partager ce constat en ajoutant qu’il pouvait être étendu à l’intégralité des places de toros d’Espagne tant les tercios de piques y sont réduits à un minimum syndical. Actuellement, aucune empresa, aucune organisation ne tente quoi que ce soit pour que ce moment fondamental de la Fiesta occupe la place qui devrait être la sienne dans le déroulement d’une corrida. La pique andalouse annoncée comme la panacée pour redonner du lustre aux piques n’a absolument rien changé à la triste réalité. A Pamplona, à Madrid, à Bilbao, à Séville, les toros ont droit à leurs deux rencontres réglementaires qui peuvent se traduire la plupart du temps pas une première pique longue, carioquée, parfois assassine suivie d’un picotazo au petit bonheur la chance. Dans le contexte actuel d’obsession de l’antitaurinisme et de la défense « de nos valeurs et de nos traditions allons enfants…», le débat et après lui l’engagement autour de la suerte de varas sont devenus un infime détail auxquels ne s’accrochent plus que quelques illuminés. La pique pourrait être un spectacle magnifique, elle ne se résume plus qu’à une poignée de minutes durant lesquelles la majorité attend la suite et une minorité de plus en plus exsangue ronge sa frustration de ne pouvoir juger comme il se devrait la bravoure du toro. Pire, au regard des mauvaises manières de beaucoup de piqueros, les toros n’y sont même pas corrigés, ils sont punis ou câlinés, c’est au choix, dans l’indifférence généralisée. Ajoutons, dans le cas de Pamplona mais aussi de Madrid, les mauvaises et lourdes cuadras de caballos.

Les six toros de Miura ont donc subi ce 14 juillet la même punition que les 42 autres toros de la Feria del Toro. Hauts, longs, fins, armés à la sauce pamplonica, il fut difficile d’apprécier leur bravoure foncière. Dans l’absolu, le lot fut plutôt anodin au cheval, sans poder et souvent même marqué par une faiblesse rageante. Les premières piques étaient longues, les cariocas furent automatiques et si les Miura démontrèrent une certaine fixité sous le fer, ils ne s’employèrent que très peu.

Davila Miura a touché les deux toros les plus abordables du lot et en profita à son premier pour démontrer que même à la retraite, même légèrement périphérique, il pouvait mettre le bain à certains collègues en activité, ce jour Rafaelillo et Javier Castaño. Le premier fut fidèle à lui-même dans ses attitudes mais en pire : son toreo fut une succession de n’importe quoi, de vulgarités et de brusqueries réalisés à genou, debout, tordu en deux, le cul en arrière, la voix nasillarde, le cheveu gominé. Se sentant injustement lésé par la présidence qui refusa de lui accorder des oreilles, il déclara par la suite que les courses comme celles de Miura faisaient partie d’un circuit parallèle et qu’il fallait que les palcos en tiennent compte à l’heure de distribuer les trophées. Si le torero n’a pas complètement tort, il confond le mot circuit avec celui de cirque car ce qu’il proposa à son second Miura relève plus du monde de Pinder que de celui de  »Guerrita’. Castaño, lui, est intéressant particulièrement aux banderilles où brille toujours sa cuadrilla. Après, pffffff, écrivons-le sans ambages, il ennuie son monde même face à des cornus dont il convient de reconnaître la tendance aux hachazos, aux mauvais coups et aux charges courtes. Pour autant, l’impossible n’était pas Miura ce 14 juillet.

A 20h38 – si Pamplona n’est pas un exemple en matière d’attention du public, nous ne pouvons qu’inciter les organisateurs français à prendre exemple sur la Meca pour l’efficacité avec laquelle le timing d’une corrida est respecté malgré quatre tours de piste. Nos novilladas et corridas frôlent régulièrement les 3 heures (ça devient une habitude) quand en Navarre le tout est plié en 2h et quelques broutilles – une foule de grands et petits attendait aux portes des arènes pour y pénétrer afin d’assister à l’ultime sortie des Peñas maintenant étroitement surveillées par des flics au niveau des andanadas – tout se perd ! Les Navarrais se retrouvaient entre eux pour se dire au revoir, à l’an prochain, pobre de mi et Viva San Fermín ! Depuis la route du retour, Pampelune dans le dos, nous, aficionados a los toros, ne pouvions pas ne pas nous dire dans un murmure, buenas tardes tristeza…

  1. J M Répondre
    Pas où mauvis "tercio de varas" pas d'oreilles distribuées. Je suis persuadé que de succédanés nous reviendrions à de vrais tiers de piques.
  2. Anne Marie Répondre
    Et pourtant, si c'est là que cela doit continuer de vivre, c'est bien là... C'est pas à Nîmes. Tant pis pour moi.

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